c'est une juste une question de stats.. et puis chez certains tu peux vérifier d'où vient leur intérêt pour la profession : parents journalistes!
évidemment, des parents journalistes c'est l'idéal...
Mais il me semble que d'autres professions peuvent être privilégiées également, pour différentes raisons..
N'oublions pas que le journaliste (au sens générique) est non seulement le transmetteur, mais aussi le producteur du discours dominant, de la doxa comme on dit, le maillon de plus en plus essentiel à la perpétuation du système tel qu'il est, le garant de l'ordre établi. Plus le journaliste sera capable d'exprimer talent et énergie en ce sens, plus il verra sa progression s'accélérer, plus les puissants le gratifieront économiquement et symboliquement à l'intérieur du champs médiatique - et même parfois à l'extérieur : accession à des responsabilités politiques ou publiques par exemple. S'il s'évertue un peu trop à essayer de changer les rapports de force dans le mauvais sens ou un peu trop vite, il se verra confiner à des tâches subalternes, voire à des organes marginaux. La profession des parents du candidat à l'école de journalisme est l'un des principaux déterminants de la place qu'il occupera plus tard, étant donné qu'on a toujours tendance à défendre les valeurs de son milieu pour faire fructifier son petit capital. Il convient donc, pour les dirigeants de ces établissements de fournir aux divers recruteurs la diversité adéquate, dans des proportions acceptables par tous. Cet élément n'est donc pas stricto sensu discriminant pour l'accès aux études - en dehors des inégalités habituelles et de plus en plus marquées ces dernières années qui frappent l'ensemble des grandes écoles - mais il constitue un marqueur fondametal qui, conjugué à d'autres (l'adresse, l'apparence physique, la dimension politique exprimée dans les copies etc.), permet à ces dirigeants,pas folles les guêpes, de prévoir à peu de choses près ce que vous deviendrez dans la profession, ou en tout cas le style de carrière que vous pouvez effectuer. Il leur faut du Mohamed fils de chômeur pour la radio associative de la cité, du fils discret de journaliste de province pour certaines "charges" stratégiques comme un poste de correspondant au Monde ou la direction de canards de PQR, de l'orphelin flamboyant et revanchard pour les postes les plus exposés, et puis le traditionnel lot d'enfants de la bourgeoisie d'argent pour défendre le grand capital et de la bourgeoisie culturelle pour canaliser sainement les "forces de progrès" etc.
Ces dirigeants connaissent parfaitement la demande des recruteurs, puisque ce sont les mêmes. Ils connaissent parfaitement l'ensemble des forces qui tendent et sous-tendent le champs médiatique et ils savent bien mieux que vous-mêmes la place qui peut vous attendre. Cela est d'autant plus vrai que le journalisme fait infiniment plus appel que les autres professions dans sa pratique à des "savoirs intégrés", à des pré-requis, à des attitudes et des comportements standards qui ne vous seront jamais explicités clairement. Soit vous les avez acquis par votre milieu, soit vous serez exclus. Une bonne moitié du travail du journaliste consiste à comprendre et à produire ce qu'on attend de lui sans jamais le lui formuler, même pour soi. En ce sens, le journalisme est sans doute une des professions où la reproduction des élites est la plus flagrante. Et c'est bien logique puisque sa fonction essentielle dans la société c'est justement de produire le discours qui, quelles que soient les tensions, saura s'y adapter pour assurer la permanence et la pérennité de ces positions dominantes.
"Chiens de garde", "petits soldats", comme vous voudrez... Ce qui est sûr c'est que, au-delà de votre intelligence et de vos talents propres, vous n'accéderez qu'aux responsabilités que vos intérêts sociaux valoriseront - et inversement. Et la profession de vos parents conditionne en grande partie vos intérêts sociaux.
Former un étudiant journaliste c'est donc aussi, sans doute, lui faire comprendre où sont ses intérêts, et lui rappeler au besoin d'où il vient...
La sociologie est un sport de combat et le journalisme un club de supporters....
Ne craignez donc pas d'avoir des parents pauvres qui risquent de ne pas pouvoir assurer les frais de scolarité de l'école, mais craignez infiniment la violence symbolique qui s'exercera sur vous en raison de cette origine qu'on ne manquera jamais de vous rappeler de la manière la plus cruelle... Craignez de devoir trahir pour réussir à travailler correctement... Craignez de devoir supporter avec zèler des équipes étrangères et honnies....
Mais, après tout, le journalisme ça mène à tout, il suffit d'en sortir...