C'était en tout cas le cas il y a … quelque temps : ma compagne, sortant d'une formation à Coforma, me reprenait quand je disais « à chaque fois », arguant de ce que l'on venait de lui enseigner. J'aurais donc dû écrire : « Certains formateurs […] rejetaient catégoriquement […]. »Porcile a écrit :Je sais aussi que les formateurs de Formacom rejettent, eux, catégoriquement cette formule. Catégoriquement ?
Perles de journalistes
Re: Perles de journalistes
Re: Perles de journalistes
Histoire de réactiver ce fil, ceci, pioché dans Le Parisien de lundi 20 juin : « Ben Ali et sa femme sont accusés d'accaparation de biens publics. »
Re: Perles de journalistes
Décidément, je ne me ferai jamais à cette tendance maladive qu'ont les gens de médias à toujours vouloir remplacer un mot simple qui dit bien ce qu'il veut dire par un mot de la même famille sémantique, mais de sens sensiblement différent, juste parce que celui-ci présente, à leurs yeux, l'avantage d'être doté d'une ou deux syllabes supplémentaires, ce qui leur permet de paraître plus savants.
Il y eut jadis le glissement de heure à horaire, deux mots de sens pourtant différents selon mon Petit Larousse de 2003 (mais il ne m'étonnerait pas que ça ait changé dans les dernières éditions du PLI). Sur le même modèle, il y eut la transformation de prix en tarif (et là, mon vieux PLI admettait déjà tarif = prix en deuxième entrée). Plus récemment, les problèmes devinrent des problématiques et leurs cousins les thèmes, des thématiques.
Je remarque que, sous couvert de modernisme (modernisation ? modernisationnisme ?), ces modifications aboutissent à un appauvrissement de la langue. Là où nous avions deux mots désignant deux concepts, nous avons deux mots qui veulent dire la même chose. Quoique pas toujours…, ce qui ne nous simplifie pas la compréhension. Parce que si horaire voulait toujours dire heure et si problématique voulait toujours dire problème, ce serait simple. Mais il arrive qu'horaire signifie horaire et que problématique signifie problématique, et c'est là que ça se corse ! Car comment savoir si celui qui me dit horaire veut parler de l'heure du départ de son train (sens normal du mot heure) ou de l'ensemble des heures de départ des trains de la gare Montparnasse (sens originel du mot horaire) ? Ou si celui qui me dit tarif veut parler du prix du café au bar du coin (sens normal du mot prix) ou bien de l'ensemble des prix pratiqués dans ce bar (sens originel du mot tarif) ? Et cette problématique dont parle un ministre, est-ce bien l'ensemble des questions qui se posent dans tel ou tel domaine ou est-ce simplement le problème auquel il est confronté ?
A rapprocher (mais ça nous emmène encore plus loin) du désormais inévitable au nord de … mis pour dans le nord de … Ainsi, quand je lis que telle ville est située « au nord de la Syrie », je dois consulter mon atlas pour savoir s'il s'agit d'une ville qui se trouve en Syrie, dans une région septentrionale de ce pays (et dans ce cas le journaliste a commis l'erreur classique), ou d'une ville qui se trouve à l'extérieur de la Syrie dans la direction du nord, donc « dans le sud de la Turquie » vraisemblablement (et alors le journaliste a écrit correctement).
Que, dans les exemples que je viens de citer, il faille se reporter au contexte, voire effectuer des recherches, est bien la preuve que ces formes qui se disent modernes font perdre au français de sa précision. Alors à quoi servent-elles ?
Comme on n'arrête pas le progrès, j'ai entendu récemment à la télévision que la police avait « installé un périmètre de sécurisation » et à la radio que l'Education nationale avait « manqué de professionnalisation ». Cela m'a rappelé le sketch des Inconnus dans lequel le sosie d'un producteur de cinéma parlait avec extase d'un film « bouleversifiant ». C'est tout à fait ça !
Dans un autre genre, le Parisien nous disait que, dans son émission de samedi soir, Patrick Sébastien serait « entouré d'une véritable noria d'artistes ».
Il y eut jadis le glissement de heure à horaire, deux mots de sens pourtant différents selon mon Petit Larousse de 2003 (mais il ne m'étonnerait pas que ça ait changé dans les dernières éditions du PLI). Sur le même modèle, il y eut la transformation de prix en tarif (et là, mon vieux PLI admettait déjà tarif = prix en deuxième entrée). Plus récemment, les problèmes devinrent des problématiques et leurs cousins les thèmes, des thématiques.
Je remarque que, sous couvert de modernisme (modernisation ? modernisationnisme ?), ces modifications aboutissent à un appauvrissement de la langue. Là où nous avions deux mots désignant deux concepts, nous avons deux mots qui veulent dire la même chose. Quoique pas toujours…, ce qui ne nous simplifie pas la compréhension. Parce que si horaire voulait toujours dire heure et si problématique voulait toujours dire problème, ce serait simple. Mais il arrive qu'horaire signifie horaire et que problématique signifie problématique, et c'est là que ça se corse ! Car comment savoir si celui qui me dit horaire veut parler de l'heure du départ de son train (sens normal du mot heure) ou de l'ensemble des heures de départ des trains de la gare Montparnasse (sens originel du mot horaire) ? Ou si celui qui me dit tarif veut parler du prix du café au bar du coin (sens normal du mot prix) ou bien de l'ensemble des prix pratiqués dans ce bar (sens originel du mot tarif) ? Et cette problématique dont parle un ministre, est-ce bien l'ensemble des questions qui se posent dans tel ou tel domaine ou est-ce simplement le problème auquel il est confronté ?
A rapprocher (mais ça nous emmène encore plus loin) du désormais inévitable au nord de … mis pour dans le nord de … Ainsi, quand je lis que telle ville est située « au nord de la Syrie », je dois consulter mon atlas pour savoir s'il s'agit d'une ville qui se trouve en Syrie, dans une région septentrionale de ce pays (et dans ce cas le journaliste a commis l'erreur classique), ou d'une ville qui se trouve à l'extérieur de la Syrie dans la direction du nord, donc « dans le sud de la Turquie » vraisemblablement (et alors le journaliste a écrit correctement).
Que, dans les exemples que je viens de citer, il faille se reporter au contexte, voire effectuer des recherches, est bien la preuve que ces formes qui se disent modernes font perdre au français de sa précision. Alors à quoi servent-elles ?
Comme on n'arrête pas le progrès, j'ai entendu récemment à la télévision que la police avait « installé un périmètre de sécurisation » et à la radio que l'Education nationale avait « manqué de professionnalisation ». Cela m'a rappelé le sketch des Inconnus dans lequel le sosie d'un producteur de cinéma parlait avec extase d'un film « bouleversifiant ». C'est tout à fait ça !
Dans un autre genre, le Parisien nous disait que, dans son émission de samedi soir, Patrick Sébastien serait « entouré d'une véritable noria d'artistes ».
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Re: Perles de journalistes
Ce n'est pas vraiment une perle, le Canard lui a décerné la "noix d'honneur", moi j'appelle ça du foutage de gueule, mais je suis preneur si quelqu'un a une expression plus élégante. Je veux parler du communiqué d'EDF en réponse aux accusations de fuite radioactive dans un réacteur : "Il n'y a pas de fuite, il y a une légère inétanchéité". Rassurant, non ?
Re: Perles de journalistes
Si un jour je conduisais bourré (ce qui est très peu probable) et que les flics m'arrêtent, je dirais : « Il n'y a pas d'état d'ivresse, il y a une légère intempérance. »la petite bête a écrit :Ce n'est pas vraiment une perle, le Canard lui a décerné la "noix d'honneur", moi j'appelle ça du foutage de gueule, mais je suis preneur si quelqu'un a une expression plus élégante. Je veux parler du communiqué d'EDF en réponse aux accusations de fuite radioactive dans un réacteur : "Il n'y a pas de fuite, il y a une légère inétanchéité". Rassurant, non ?
Re: Perles de journalistes
Merci infiniment pour ce beau thread, à la fois drôle et terriblement instructif.
Ma perle : 4 pages (pages 2, 3, 4 et 5) sont actuellement intitulées "Estivités", dans le journal La république du centre.
J'ai évidemment tilté sur le mot Estivité. Suis allée faire un tour par le tlf : inconnu.
Quelqu'un a-t-il connaissance de ce mot ? Ou n'est-ce que frime mal venue de la part d'un rédacteur en chef en manque de soleil ?
Constance
PS : Je ne suis qu'une lectrice et nullement une correctrice, sauf quand ça me siffle aux oreilles.
Ma perle : 4 pages (pages 2, 3, 4 et 5) sont actuellement intitulées "Estivités", dans le journal La république du centre.
J'ai évidemment tilté sur le mot Estivité. Suis allée faire un tour par le tlf : inconnu.
Quelqu'un a-t-il connaissance de ce mot ? Ou n'est-ce que frime mal venue de la part d'un rédacteur en chef en manque de soleil ?
Constance
PS : Je ne suis qu'une lectrice et nullement une correctrice, sauf quand ça me siffle aux oreilles.
Re: Perles de journalistes
Je ne sais pas si le mot « existe » dans un ouvrage de référence, mais je le vois régulièrement écrit et, selon toute vraisemblance, la graphie est voulue par les auteurs. L'idée, je pense, est d'établir un trait d'union entre la période estivale et les festivals qui l'accompagnent.constance brinner a écrit :Merci infiniment pour ce beau thread, à la fois drôle et terriblement instructif.
Ma perle : 4 pages (pages 2, 3, 4 et 5) sont actuellement intitulées "Estivités", dans le journal La république du centre.
J'ai évidemment tilté sur le mot Estivité. Suis allée faire un tour par le tlf : inconnu.
Quelqu'un a-t-il connaissance de ce mot ? Ou n'est-ce que frime mal venue de la part d'un rédacteur en chef en manque de soleil ?
Constance
PS : Je ne suis qu'une lectrice et nullement une correctrice, sauf quand ça me siffle aux oreilles.
Re: Perles de journalistes
C'est joli Estivités. Ça sonne bien et ça dit bien ce que ça veut dire : Fêtes estivales. Pour moi, c'est un néologisme bien né.
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Re: En voilà une belle...
Comme vous le savez sans doute, Joseph Macé-Scaron est accusé de plagiat... Il aurait recopié "par inadvertance" quelques passages d'un livre de Bill Bryson, et aurait aussi (inadvertance, distraction...) omis de citer l'auteur plagié...
Et ce bon Pierre Assouline de hurler au lynchage, en expliquant que non, il ne s'agissait pas de "plagiat", mais "d'innutrition"... En clair, ce mot étrange venu d'ailleurs, que je n'ai pas trouvé dans le Robert des difficultés, veut dire "y'a pas de plagiat, non mais ho..."
http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=11892
Il faut dire que ce défenseur de la liberté de copier travaille au Magazine Littéraire, dirigé par ... Joseph Macé-Scarron. Ceci explique sans doute cela...
Et ce bon Pierre Assouline de hurler au lynchage, en expliquant que non, il ne s'agissait pas de "plagiat", mais "d'innutrition"... En clair, ce mot étrange venu d'ailleurs, que je n'ai pas trouvé dans le Robert des difficultés, veut dire "y'a pas de plagiat, non mais ho..."
http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=11892
Il faut dire que ce défenseur de la liberté de copier travaille au Magazine Littéraire, dirigé par ... Joseph Macé-Scarron. Ceci explique sans doute cela...

Re: Perles de journalistes
Dans Le Monde de mercredi dernier, on est « sans aucune nouvelle » de quelqu'un. Dans Le Parisien de ce matin, on « n'a pas de nouvelle » de quelqu'un. Chacun ici connaît le vieux débat au sujet de sans : doit-on dire un ciel sans nuage (sans un seul nuage) ou un ciel sans nuages (car il y a toujours plusieurs nuages dans le ciel) ? Mais, dans les deux exemples ci-dessus, il ne s'agit pas de cela. Parce que une nouvelle dans le sens de « renseignements sur la situation de quelqu'un, sa santé, etc. », cela ne se dit pas. On ne dit pas : « J'ai reçu une nouvelle de mon ami X. », on dit des nouvelles. On ne dit pas : « Donne-moi ta nouvelle », mais de tes nouvelles.
Sauf dans Le Monde et Le Parisien de nos jours…
PS : Réflexion annexe : curieux tout de même que lemonde.fr, où officient les deux excellents correcteurs qui animent l'excellent blog Langue sauce piquante comporte de nombreuses erreurs, souvent grossières.
Sauf dans Le Monde et Le Parisien de nos jours…
PS : Réflexion annexe : curieux tout de même que lemonde.fr, où officient les deux excellents correcteurs qui animent l'excellent blog Langue sauce piquante comporte de nombreuses erreurs, souvent grossières.
Re: Perles de journalistes
Ce n'est pas une perle de journaliste, mais d'un forumeur apprenti correcteur. Et je la trouve très mignonne.j'ai vu aussi quelques regards en chiens de faïence, comme si des préavis de guerre étaient lancés
Les diplomates ont désormais une nouvelle mission : négocier avec celui des belligérants qui aura déposé son préavis de guerre. Ça va barder lors des fameux dîners de l'ambassadeur.
Re: Perles de journalistes
Bonjour à tous, et aux anciens, et aux nouveaux,
Je vous propose une petite épreuve de cohérence. Une phrase de la presse en ligne à reformuler (lue sur 20minutes.fr) :
« Les deux hommes sont alors descendus pour s'expliquer et des échanges verbaux ont causé sa chute mortelle par électrocution. »
Bon courage !

Je vous propose une petite épreuve de cohérence. Une phrase de la presse en ligne à reformuler (lue sur 20minutes.fr) :
« Les deux hommes sont alors descendus pour s'expliquer et des échanges verbaux ont causé sa chute mortelle par électrocution. »
Bon courage !


Ces technologies fabriquent une société qui détruit ce qui permet une vie décente.
Sous nos yeux, on voit le monde plonger dans le libéralisme.
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Re: Perles de journalistes
Merci pour le petit jeu, Pascal ! C'est vrai que cette phrase est terrriiible !
– Un "échange verbal" est trop neutre et donne l'impression de personnes qui devisent cordialement.
- Il ne faut pas de pluriel : un échange verbal signifie déjà qu'il y a des réparties de part et d'autre.
– Il faut qu'il soit clair que "l'échange verbal" a lieu entre ces deux hommes-là. En lisant la phrase, on pourrait croire que c'est un échange qui passait par là, par hasard…
– Et le "sa chute" ne colle pas, puisqu'on parle de deux hommes.
– "Une chute mortelle par électrocution", c'est étrange ! Rire...
Une proposition sans doute imparfaite (peut-être trop de réécriture, mais c'est difficile de faire autrement) :
« Les deux hommes sont alors descendus pour s'expliquer et se sont laissés emporter par leur affrontement verbal. L'altercation a causé la chute de l'un d'entre eux, qui est mort par électrocution. »
– Un "échange verbal" est trop neutre et donne l'impression de personnes qui devisent cordialement.
- Il ne faut pas de pluriel : un échange verbal signifie déjà qu'il y a des réparties de part et d'autre.
– Il faut qu'il soit clair que "l'échange verbal" a lieu entre ces deux hommes-là. En lisant la phrase, on pourrait croire que c'est un échange qui passait par là, par hasard…
– Et le "sa chute" ne colle pas, puisqu'on parle de deux hommes.
– "Une chute mortelle par électrocution", c'est étrange ! Rire...
Une proposition sans doute imparfaite (peut-être trop de réécriture, mais c'est difficile de faire autrement) :
« Les deux hommes sont alors descendus pour s'expliquer et se sont laissés emporter par leur affrontement verbal. L'altercation a causé la chute de l'un d'entre eux, qui est mort par électrocution. »
Re: Perles de journalistes
N’hésitez pas, Catherine, il faut tout réécrire ! Plus exactement, il faut tout écrire. On pourrait envisager, par exemple :
Les deux hommes sont alors descendus sur le quai pour s’expliquer. L’échange verbal est vite devenu un échange de coups, au cours duquel **** est tombé sur la voie et a été électrocuté. Il n'a pas pu être ranimé.
*** Ici, on écrira, selon ce qui a a été dit dans l’intro :
— l’un des deux protagonistes,
— la victime,
— le jeune Sri-Lankais
ou tout autre sujet correspondant au contexte.
Attention Catherine : ils se sont laissé emporter.
Les deux hommes sont alors descendus sur le quai pour s’expliquer. L’échange verbal est vite devenu un échange de coups, au cours duquel **** est tombé sur la voie et a été électrocuté. Il n'a pas pu être ranimé.
*** Ici, on écrira, selon ce qui a a été dit dans l’intro :
— l’un des deux protagonistes,
— la victime,
— le jeune Sri-Lankais
ou tout autre sujet correspondant au contexte.
Attention Catherine : ils se sont laissé emporter.
Re: Perles de journalistes
Cela me fait penser à un article lu il y a quelques jours. On y apprenait qu'un « conducteur de 50 ans » (notez bien) avait péri dans un accident. Suivaient quelques explications sur les circonstances du drame, parmi lesquelles on trouvait ceci : « Le véhicule a percuté un arbre et s'est embrasé. Le conducteur et le véhicule n'ont pu être identifiés : le corps est totalement calciné et les plaques d'immatriculation sont inexploitables, l'une détruite par le feu, l'autre encastrée dans l'arbre. »
Faut-il en déduire que c'est madame Soleil qui a écrit l'article ?
Faut-il en déduire que c'est madame Soleil qui a écrit l'article ?